Chapitre 2 : Lames anonymes

Les débuts ne furent pas évidents, la méfiance mettait régulièrement des bâtons dans les roues de l’unité du groupe. Mais ce que la confiance aurait eu du mal à cimenter, l’argent fit des miracles. Mais chaque combat leur permettait de fraterniser un peu plus et de transcender cette stupide frontière entre Bontariens et Brakmariens. Finalement, une véritable loyauté s’instaura entre eux mais surtout pour Erinyes. Pour lui, ils auraient tué ou sacrifié leur vie sans condition.

Etrangement, dans la période qui suivit cet accord secret, les affaires des deux cités ne connurent jamais meilleur succès : toutes les missions étaient couronnées de succès pour des pertes minimales, les gardes d’élites n’avaient jamais été aussi performantes. Et pour cause…

Pourtant, cela ne suffisait pas à ces guerriers, qui rongeaient leur frein de devoir plier devant des supérieurs distants. Un soir de répartition des payes dans leur habituelle arrière salle de la taverne d’Astrub, un des seconds lâcha l’idée qui leur trottait plus ou moins à tous dans la tête.


- Pourquoi ne pas élargir notre champ d’action ? Nos cités sont peuplées de riches crétins prêts à débourser des millions pour que l’on s’occupe de leurs petites affaires !

Erinyes resta dubitatif : il ne se voyait pas mettre son épée au service du premier venu, sans compter les problèmes que cela ne manqueraient pas de générer.

- Nous ne pourrons pas éternellement jouer à ce petit jeu, les maîtres de Bonta et Brakmar finiront par découvrir nos manigances. Autant nous préparer une porte de sortie ! Ecoute Erinyes, je ferais n’importe quoi pour toi, mais viendra un jour où nous devront déguerpir, je préfère assurer mes arrières et compter sur un beau petit pactole pour mes vieux jours plutôt que sur la crédulité actuelle de nos dirigeants.

Leur chef se leva et marcha de longue minutes dans l’étroite pièce, réfléchissant aux tenant et aboutissants de cette proposition. Il finit par revenir à la table et reprit sa place.

- Soit ! Mais que chacun prenne des mesures drastiques ! Je ne veux pas que cela tourne court pour des conneries ! Et en premier lieu, vous ne traiterez jamais avec ces… clients sous votre véritable identité !

Il fut ainsi décidé qu’ils opéreraient dans un anonymat total : Erinyes leur donna des noms de code, afin que leur véritable identité ne soit jamais révélée lors de l’exécution de ces contrats. Il leur fut simple de cacher leur appartenance, quelques guerriers parmi les multitudes que constituaient les deux armées… Au fond, qui se serait soucié de savoir qui était payé du moment que le travail était fait ? Les mois, les années passèrent, les affaires prospéraient, à un tel point que ce mercenariat finit par prendre le dessus sur leurs activités premières, au point qu’ils finirent par acquérir une certaine renommée dans le milieu.

Une bière de trop ? Une confidence mal placée ? Nul ne sut jamais qui cracha le morceau. Peut-être avaient-ils simplement été trop gourmands ? Trop voyants ? Trop… indispensables ? Etre dans les petits papiers des grands de ce monde avait des avantages, mais pouvait sinistrement nuire à court terme. Après toute ces années de bons et loyaux services – et viles et basses tâches accomplies dans l’ombre, la troupe d’Erinyes avait fini par devenir gênante…

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