Créer un site internet

Où tout n'est qu'apparence (Fraouctor 629)


Des pas lourds soulevaient de petits nuages de poussières dans l’atmosphère lourde de cette fin d’après midi. L’orage, qui couvait depuis plus d’une heure, lorsque de fines gouttes de pluie commencèrent à imbiber le sol surchauffé, rejoignant les rigoles tracées par le sang versé.

- Manqué plus que ça… Fichu temps…

L’homme rajusta sa cape autour de lui, fuyant les larmes du ciel, et s’arrêta pour contempler le tableau morbide s’offrant à ses yeux. Des escarmouches entre Bontariens et Brakmariens, il en avait vu des centaines, chaque jour, chaque mois, depuis des années. Les lieux et les méthodes changeaient, mais pas le résultat : des morts de chaque côté, sans que cette guerre ne prenne un tournant décisif.

- Un carnage de plus… Ils ne comprendront jamais, toujours à s’étriper à vue. Au moins, ça me fait vivre.

Il eut un reniflement de dédain suivi d’un sourire réjoui, avant de se pencher sur les corps étendus à terre. La rapine et le détroussement de cadavre, encore deux excellents moyens d’arrondir les fins de mois à moindre frais. Et en ces temps troublés, il n’y avait pas de risque de pénurie de ce côté-là.

- Bande de corbacs ! Bientôt ils ne laisseront même plus un os à ronger ! Oh, mais qu’avons-nous là ?

Pestant contre les soldats – les corps avaient été dépouillés de tous leurs biens de valeur – l’homme était arrivé au dernier cadavre, étendu face contre terre, et l’avait retourné pour procéder à sa petite inspection.
- Oh, mais qu’avons-nous là ?

Il marqua quelques secondes d’étonnement : malgré le sang et la boue, il devinait la sacrieuse jeune mais déjà marquée par la vie, mais surtout vivante, ou si peu. Mais dans l’existence qui était la sienne, il n’y avait pas de place pour la pitié, et encore moins vis-à-vis des guerriers des deux cités.

- Bontarien, Brakmarien… Tous pareils, chiens de guerre ne méritant pas de vivre.

La main sur le cou de la sacrieuse, il s’apprêtait à l’achever sans plus de sentiment en lui brisant la nuque, quand quelque chose au fond de lui brisant son élan, comme si une voix profonde et silencieuse lui imposait de l’épargner. Ses mains refusaient d elui obéir, comme douées d’une volonté propre – ou contrôlées par une détermination supérieur. Il lutta contre lui-même pendant de longues minutes, mais finit par lâcher prise, avec un soupir d’exaspération.

- Il faut croire que ton heure n’est pas venue ma jolie… Que vais-je bien pouvoir faire de toi ?

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire